Revenus sur le devant de la scène à l’occasion de la COP 16, qui s’est tenue du 21 octobre au 1er novembre à Cali en Colombie, les certificats biodiversité font l’objet depuis quelques années d’études pour quantifier et certifier les actions en faveur des écosystèmes.
Conçus comme un levier d’action favorisant la restauration de la biodiversité dans le monde, ces certificats ont pour objectif d’inciter le secteur privé à s’engager activement dans la préservation des écosystèmes.
Cette initiative s’inscrit dans la continuité de l’accord-cadre de Kunming-Montréal, qui a appelé les entreprises à mobiliser des ressources et aligner leurs investissements sur les objectifs internationaux en matière de biodiversité. En 2022, plus de 83 % des investissements pour la biodiversité provenaient de financements publics alors que plus de 50 % du PIB mondial dépend de manière critique de sa bonne santé, selon le rapport des Nations Unis sur l’environnement [1].
Découvrez dans cet article les enjeux autour des certificats biodiversité (aussi appelés crédits biodiversité) et leur mise en place sur le marché.
Qu’est-ce que les crédits ou certificats biodiversité ?
Fondé sur un modèle quasi similaire aux crédits carbone, les crédits biodiversité sont un outil permettant le financement d’actions en faveur de la préservation et la restauration de la biodiversité.
Ce système vise à répondre à l’objectif de lever 200 milliards par an de dollars d’ici 2030 pour la biodiversité, tel qu’énoncé dans le cadre des accords Kunming-Montréal adoptés lors de la COP15. Il correspond à l’objectif 19 des accords, portant sur le développement du financement privé.
À la suite de ces travaux, le Comité Consultatif International sur les crédits biodiversité (IAPB), initié par la France et le Royaume-Uni, recommande que les crédits prennent la forme de certificats, attestant d’actions positives, vérifiables, durables et additionnelles, réalisées pour la biodiversité.
Bien que des inquiétudes subsistent autour de leur mesure, les certificats biodiversité se veulent être, au même titre que les crédits carbone, soumis à un ensemble de réglementations et standards permettant leur évaluation sur une période donnée de l’état des écosystèmes. C’est pourquoi, l’IAPB ainsi que d’autres organisations dont le cabinet Carbone 4 recommandent la mise en œuvre d’un cadre réglementaire mondial visant à garantir la haute intégrité de ces certificats.
Une méthodologie encore (difficile) à définir
Si les crédits biodiversité se présentent comme une solution pour enrayer le déclin des écosystèmes, il est pour l’heure difficile d’établir une méthodologie commune. En effet, de manière générale, il est encore ardu de mesurer la biodiversité en raison de son caractère complexe, contrairement à la comptabilisation du carbone. Chaque espèce du vivant ne faisant pas toujours l’objet d’une évaluation. Pourtant, ces méthodologies sont essentielles à la création de labels capables de certifier et de garantir l’intégrité des certificats, ainsi que l’efficacité de leur impact.
Plus de 50 méthodes sont en cours de développement dans le monde, menées par diverses organisations dont Carbone 4, la Fondation pour la recherche sur la biodiversité, le Muséum National d’Histoire Naturelle.
Sur quels critères de mesure se baser ?
L’IAPB a lancé en 2023, à l’occasion du Sommet pour un nouveau pacte financier mondial à Paris, une feuille de route en vue de structurer le marché des certificats biodiversité dans le monde [2]. Des premières conclusions ont ainsi pu être présentées en octobre 2024. Le groupe d’experts mandaté a ainsi relevé 8 principales conclusions à prendre en compte pour la mise en place d’un marché intègre et transparent [3]. Celui-ci s’appuierait notamment sur la mise en place de politique publique, la mesure sine qua non des bienfaits pour la nature, le savoir des communautés locales et la mise à disposition de preuves tangibles.
Une seconde feuille de route a également été réalisée par l’OBC (Organization for Biodiversity Certificate), en collaboration avec un panel d’experts internationaux issus de Carbone 4 ou encore du Muséum National d’Histoire Naturelle. Cette feuille de route s’appuie sur une toute autre méthodologie : l’OBC propose de quantifier le gain des actions en faveur de la biodiversité en considérant la capacité d’accueil de la biodiversité d’un territoire donné, c’est-à-dire la capacité de l’écosystème à accueillir et à faire vivre des espèces [4].
Dans cette logique, des catégories homogènes d’écosystèmes seraient mises en place ainsi qu’un ensemble de paramètres, tels que les pratiques anthropiques ou les caractéristiques de l’écosystème, afin d’évaluer leur capacité dans le temps et les gains associés à certains changements de pratiques.
Leur rôle dans la lutte pour restaurer les écosystèmes
Face à l’ampleur du déclin de la résilience des écosystèmes, tel qu’illustré par le dernier rapport de la WWF [5], il est urgent pour les organisations publiques comme privées d’agir.
La mise en place de certificats biodiversité représente un moyen de financer des actions en faveur de la restauration de la biodiversité. Ils encouragent des actions additionnelles, c’est-à-dire des projets qui n’auraient pas été réalisés sans ce financement externe. Cela permet d’accroître et d’accélérer les actions en faveur de la régénération des écosystèmes.
Cependant, leur mise en œuvre nécessite une grande rigueur pour éviter les dérives et garantir leur efficacité. Il est important de souligner que les certificats ne doivent pas être considérés comme une solution miracle, mais plutôt comme un outil complémentaire aux autres mesures de protection et de restauration de la nature, telles que la mise en place de dispositifs de protection, la réduction des atteintes aux habitats naturels ou le recyclage des déchets. La diversification des mécanismes publics et privés permet d’inciter les organisations privées à s’engager pleinement dans la restauration de la biodiversité.
Un outil pour une stratégie climat et biodiversité réussie ?
Alors que 72 % des entreprises européennes dépendent directement ou indirectement de la biodiversité [6], on sait aujourd’hui qu’il est essentiel pour les entreprises de s’emparer du sujet et d’accorder une place centrale à la biodiversité, dans leurs actions et stratégies. Les certificats biodiversité sont alors un outil complémentaire et volontaire à leur disposition en vue d’amorcer ou d’accélérer leur trajectoire biodiversité.
Dans ce contexte, la mise en œuvre de l’ESRS E4 (European Sustainability Reporting Standards – Environnement) dans le cadre de la CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) devrait faciliter ce processus pour de nombreuses entreprises. En effet, l’ESRS E4 impose une évaluation rigoureuse des impacts liés à la biodiversité. Cette norme permet également de formaliser les actions des entreprises et de rendre compte de manière transparente des progrès réalisés.
Ainsi, elles devront réaliser un état des lieux détaillé du rapport et liens qu’elles entretiennent avec la biodiversité, en identifiant leur impacts, risques et opportunités liés à la préservation des écosystèmes.
Désormais conscientes de leur impact et de leur lien avec la biodiversité, les entreprises pourront mettre en œuvre des actions concrètes en faveur de la biodiversité, en lien avec leur chaîne de valeur ou leurs convictions.
Comment Oklima peut vous aider à financer un projet de biodiversité ?
En attendant qu’un cadre national, ou européen, puisse se mettre en place en vue de restaurer la biodiversité, il est possible pour les entreprises de contribuer à des projets à haute valeur biodiversité : participants à la régénération des habitats naturels en forêt ou dans les zones humides par exemple.
Experte en préservation et restauration des écosystèmes, Oklima, filiale du Groupe EDF, accompagne les entreprises dans l’identification et la réalisation de projets bas carbone, forestiers et agricoles par exemple, mettant en avant la biodiversité, à proximité de leurs locaux. Notre équipe, composée notamment d’écologues, d’experts biodiversité et d’agronomes, assure le suivi de ces projets, en France et à l’international.