Projets carbone forestiers : leviers phares d’une stratégie carbone durable ?

Les forêts, qui captent 76 % des gaz à effet de serre en France[1], jouent un rôle clé dans la lutte contre le changement climatique. Cependant, leur capacité à séquestrer le carbone diminue rapidement. L’intensification des crises climatiques – sécheresses, infestations de bioagresseurs et feux – combinée à des pratiques de gestion parfois inadaptées, menace leur efficacité en tant que puits de carbone. Cette situation met en péril notre objectif de neutralité carbone et exige des actions urgentes et adaptées pour préserver et renforcer leur rôle.

Dans ce contexte, les projets forestiers de qualité offrent une solution stratégique pour atteindre la neutralité carbone globale, tel que préconisé par l’Accord de Paris[2], tout en intégrant des co-bénéfices socio-économiques et écologiques.

Dans cet article nous reviendrons sur les capacités et limites des forêts à séquestrer du carbone ainsi que les bonnes pratiques pour maximiser leur impact.

Les forêts, un pilier indispensable pour la séquestration carbone

Forêt d'automne au bord d'un lac, illustrant l'importance du carbone forestier dans la séquestration du CO2

Comprendre les flux et stocks de carbone dans les forêts

Les forêts constituent le deuxième plus grand puits de carbone de la planète après les océans. Elles capturent le CO₂ par le biais de la photosynthèse et le stockent dans la biomasse aérienne (feuilles, troncs, branches), les racines et les sols. Ce stockage représente environ 46,3 % des 2 800 millions de tonnes de CO2eq présents dans la biomasse et les sols forestiers de la France métropolitaine[3].

Historiquement, les forêts françaises ont stocké environ 63 millions de tonnes de CO₂ par an entre 2010 et 2015[4]. Or la capacité de séquestration des forêts hexagonales a diminué de 50 % depuis 2010, et a chuté à 16,9 millions de tonnes de CO₂[5] en 2022.

La baisse de séquestration s’explique par plusieurs facteurs : mortalité accrue des arbres, ralentissement de leur croissance, sécheresses répétées, incendies et infestations de nuisibles. Face à cette dégradation préoccupante, il devient urgent d’adapter les stratégies de gestion forestière pour restaurer et renforcer le rôle des forêts en tant que puits de carbone.

Les forêts, piliers de l’équilibre climatique global et local

Les forêts jouent un rôle central dans la lutte contre le réchauffement climatique, à la fois au niveau mondial et national. À l’échelle mondiale, elles absorbent environ 29 % des émissions anthropiques chaque année, soit 11 Gt CO2eq[6]. Elles constituent ainsi des puits de carbone essentiels. Cependant, la déforestation inverse ce bénéfice en libérant le carbone stocké, générant ainsi 14 % des émissions mondiales annuelles[7]. (Ministère de la Transition Énergétique).

En France, la Stratégie Nationale Bas-Carbone (SNBC) vise à doubler les absorptions d’ici 2050 pour atteindre 67 MtCO2eq/an. Un objectif ambitieux, rendu difficile par les nombreux défis (sécheresse, maladie, nuisibles etc.) auxquels les forêts doivent faire face.

Co-bénéfices des projets carbone forestiers au-delà du CO2

Gardiennes du climat, les forêts jouent également un rôle majeur dans la protection des sols contre l’érosion. En stabilisant les sols, elles permettent une meilleure infiltration de l’eau, ce qui contribue à la régulation des ressources en eau. Ce processus aide à limiter le ruissellement et à prévenir les inondations, tout en maintenant un approvisionnement en eau stable pendant les périodes de sécheresse. En retour, la biodiversité des forêts soutient leur bon fonctionnement global et renforce l’équilibre du vivant.

Sur le plan économique, la filière bois constitue une ressource renouvelable précieuse. En remplaçant des matériaux à forte empreinte carbone comme l’acier ou le béton, elle permet d’éviter 32,8 MtCO₂/an d’émissions[8]. Une gestion durable des forêts maximise ainsi leurs bénéfices environnementaux et économiques pour les territoires.

Pour aller plus loin, téléchargez notre livre blanc : Les enjeux de la forêt

Les défis liés au déclin des capacités des forêts

Sous l’effet combiné du changement climatique, des déséquilibres naturels et de certaines pratiques humaines, les forêts voient leur rôle de puits de carbone s’affaiblir. Comprendre ces défis permet d’agir concrètement pour préserver les forêts et maintenir leurs services essentiels à l’équilibre climatique.

Les facteurs structurels de la dégradation des puits de carbone

Les forêts subissent une pression accrue en raison de facteurs structurels qui dégradent leur capacité à agir comme puits de carbone. Le stress climatique joue un rôle majeur : les sécheresses prolongées, le stress hydrique et les incendies ravagent les écosystèmes forestiers, comme en témoignent les 66 000 hectares parties en fumée en 2022[9]. Ces événements extrêmes perturbent non seulement la croissance des arbres, mais fragilisent aussi la structure même des forêts, ce qui ce qui diminue notablement leur capacité à capturer et stocker efficacement le carbone.

L’expansion des pathogènes représente une autre menace sérieuse. Des insectes comme les scolytes ou des maladies comme la chalarose prolifèrent, favorisés par des hivers plus doux et par la faible diversité de certaines cultures. Ces attaques affaiblissent les arbres et compromettent durablement les forêts.

Les limites naturelles des écosystèmes forestiers

Lorsque la forêt atteint un stade de maturité appelé climax, elle atteint un équilibre dynamique où sa capacité d’absorption de carbone se stabilise. Bien qu’elle continue de stocker du carbone, la quantité captée chaque année cesse d’augmenter et atteint un plateau. En effet, le carbone séquestré est en grande partie compensé par les émissions liées à la décomposition naturelle des arbres morts et des matières organiques. Ainsi les forêts matures ne captent plus de carbone à un rythme suffisant pour contrebalancer les émissions.

À cette limite naturelle s’ajoutent des différences régionales dans la façon dont les forêts stockent le carbone[10]. Par exemple, certaines forêts du Grand Est ont commencé à émettre plus de CO₂ qu’elles n’en absorbent. Cela s’explique par des sécheresses de plus en plus fréquentes et des vagues de chaleur qui ralentissent la photosynthèse des arbres et accélèrent leur respiration, libérant ainsi du carbone dans l’atmosphère.

À l’inverse, des forêts en Bretagne ou dans le Massif central continuent de capter du carbone. Elles bénéficient de conditions plus propices, comme un climat plus humide et des températures moins extrêmes, qui favorisent la croissance des arbres et leur capacité à séquestrer le carbone. Les pratiques forestières locales, comme la gestion diversifiée des essences et l’évitement des coupes rases, aident également à maintenir cette fonction de puits de carbone.

Impacts des pratiques humaines

La coupe rase perturbe profondément le stockage de carbone des forêts. En supprimant toute la végétation, elle expose les sols à l’érosion, libérant le carbone accumulé. De plus, le passage des machines tasse le sol, limitant l’infiltration de l’eau et l’activité des micro-organismes essentiels à la fixation du carbone. Ces perturbations entraînent un relargage accru de CO₂ dans l’atmosphère[11].

Par ailleurs, les monocultures, comme celles de pins dans les Landes[12], aggravent cette fragilité. Elles résistent mal aux sécheresses, aux incendies et aux attaques de pathogènes, amplifiés par le dérèglement climatique. Diversifier les essences et privilégier des pratiques  durables telles que l’introduction de feuillus adaptés, la régénération naturelle, ou encore l’éclaircie dynamique devient alors nécessaire pour maintenir des puits de carbone efficaces.

Les projets carbone forestiers comme levier pour une contribution carbone efficace

Face au déclin des capacités de séquestration des forêts, renforcer ces écosystèmes devient indispensable pour lutter contre le réchauffement climatique. Aux côtés des solutions agricoles, technologiques et énergétiques, les projets forestiers offrent une approche fondée sur la nature pour capturer durablement le CO₂.

Les critères pour des projets forestiers de qualité

Pour garantir l’efficacité des projets forestiers, il est essentiel d’aller au-delà du simple fait de planter des arbres. Seule une approche réfléchie et structurée permet de développer des forêts résilientes, capables de capter durablement le carbone tout en préservant les écosystèmes.

Pour cela, voici les standards à respecter :

➡️ Sélectionner des espèces résilientes et variées[13] pour assurer la durabilité des projets forestiers. Cela renforce la résilience des forêts face aux aléas climatiques et réduit les risques d’attaques par des ravageurs, tout en favorisant une biodiversité équilibrée. Ce critère est crucial pour maximiser l’impact carbone des forêts et soutenir la lutte contre le dérèglement climatique.

➡️ Adopter des techniques sylvicoles durables[14] pour améliorer la santé des forêts. L’éclaircie régulière stimule la croissance des arbres robustes, tandis que la régénération naturelle préserve l’intégrité des sols. En maintenant des îlots de vieillissement, la biodiversité et le stockage du carbone sont renforcés à long terme.

➡️ Impliquer les populations locales dans la gestion forestière[15] pour une approche équitable et durable. Leur connaissance des écosystèmes permet une meilleure gestion des projets bas carbone, répondant aux besoins écologiques et sociaux des territoires.

➡️ Certifier les projets avec le Label Bas-Carbone pour garantir les meilleures pratiques. En 2023, 358 projets ont été labellisés, réduisant ou stockant 1 300 000 teqCO[16] tout en protégeant la biodiversité et soutenant l’inclusion sociale.

Les bénéfices spécifiques des projets forestiers pour les entreprises engagées

Les projets forestiers labellisés bas-carbone offrent aux entreprises une opportunité concrète de contribuer à la neutralité carbone tout en générant des impacts positifs multiples. Grâce à une certification des projets, ces initiatives garantissent une séquestration mesurable et vérifiable de CO₂. Au-delà de l’absorption de carbone, elles favorisent la résilience climatique et la préservation de la biodiversité.

Les bénéfices[17] s’étendent aux territoires : ces projets dynamisent l’économie locale par la création d’emplois durables et la valorisation des savoir-faire forestiers. En impliquant activement les populations locales, ils renforcent le tissu social et préservent des paysages essentiels à l’identité régionale. Un véritable levier pour une contribution carbone efficace et responsable.

Avec Oklima, soutenez des projets de carbone forestier efficaces pour atteindre les objectifs climatiques

Les forêts jouent un rôle essentiel dans l’atteinte des objectifs climatiques de l’Accord de Paris, en agissant comme des puits de carbone. Cependant, leur potentiel de captation est aujourd’hui menacé par des défis climatiques croissants et des pratiques de gestion parfois inadaptées. Pour renforcer leur efficacité, il est essentiel que les acteurs économiques soutiennent des projets forestiers durables intégrant biodiversité, résilience climatique et restauration des écosystèmes, tout en favorisant des pratiques qui maximisent l’impact environnemental.

Les entreprises sont au cœur de cette dynamique. En investissant dès aujourd’hui dans des projets forestiers, elles contribuent à la réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Oklima, entreprise spécialisée dans le développement de projets de séquestration carbone, vous accompagne dans cette démarche en vous proposant des solutions adaptées pour renforcer votre impact environnemental tout en soutenant la transition vers une économie décarbonée.

Notes de référence :

[1] Carbone4 : Le carbone et le climat, facteurs déterminants pour l’avenir des forêts

[2] L’Accord de Paris, adopté en 2015 lors de la COP21, a pour objectif principal de limiter le réchauffement climatique à bien moins de 2°C par rapport aux niveaux préindustriels, avec une ambition de limiter cette hausse à 1,5°C d’ici 2100.

[3] IGN : Atténuation de l’effet de serre

[4] IGN : Indicateurs de gestion durable des forêts françaises métropolitaines Edition 2020

[5] Réseau Action Climat France : Où en est la France dans ses objectifs climatiques et énergétiques ? Edition 2023

[6] I4CE : Chiffres clés du climat, France, Europe et Monde

[7] I4CE : Ibid.

[8] INRA et IGN : Quel rôle pour les forêts et la filière forêt-bois française dans l’atténuation du changement climatique ?

[9] Carbone4 : Ibid.

[10] Institut Montaigne : Biodiversité et économie, les inséparables

[11] ADEME : Connaître et agir : le carbone forestier

[12] Carbone4 : Ibid.

[13] UICN : Mettre la biodiversité au cœur de l’adaptation des forêts au changement climatique

[14] CESE : Face au changement climatique, quelle sylviculture durable pour adapter et valoriser les forêts françaises ?

[15] Agence française de développement : Comment mieux associer les populations locales à la gestion des forêts ? 

[16] Réseau Action Climat : Positionnement sur le label bas-carbone et les méthodes pour le secteur agricole

[17] CNPF : Le carbone forestier au cœur de notre société